Les filtres de cigarettes, enjeu de poids du traité sur la pollution plastique

Les filtres de cigarettes, enjeu de poids du traité sur la pollution plastique

A l’approche de la deuxième session de négociations du traité sur la pollution plastique, qui se tiendra à Paris du 29 mai au 2 juin 2023, un webinaire organisé par le Global Center for Good Governance in Tobacco Control (GGTC) a précisé les axes que défendront les acteurs de la lutte contre le tabagisme. L’interdiction des filtres de cigarettes est le principal objectif des organisations de lutte contre le tabac et de protection de l’environnement.

Adopter un traité juridiquement contraignant afin de mettre un terme à la pollution plastique, tel était le sens de la résolution adoptée le 2 mars 2022 par 175 pays membres du Conseil des Nations unies pour l’environnement (CNUE). Cinq sessions de travaux préparatoires sont prévues avant les négociations du Comité intergouvernemental de négociation (CIN) devant conduire à l’adoption du traité ; la première s’est tenue du 28 novembre au 3 décembre 2022 à Punta del Este (Uruguay), la deuxième se déroulera fin mai 2023 à Paris. Originellement envisagé fin 2024, ce traité devrait pouvoir être mené à terme courant 2025.

Les filtres, source majeure de pollution plastique

De leur côté, les organisations non gouvernementales (ONG) de lutte contre le tabagisme et de protection de l’environnement alertent depuis des années sur la part considérable occupée par les déchets des produits du tabac et de la nicotine dans la pollution environnementale. 4500 milliards de mégots de cigarettes sont ainsi jetés au sol chaque année, polluant durablement terres, rivières et océans et constituant l’un des principaux déchets dans le monde. Les filtres de cigarettes étant composés de plastique (acétate de cellulose), les ONG entendent les faire reconnaître comme une des causes majeures de pollution et réclament que leur interdiction soit inscrite dans ce traité. Acté le 17 décembre 2022, le règlement d’exécution (EU) 2020/2151 de la Commission européenne a par exemple déjà spécifié que le marquage des produits en plastique à usage unique englobe les filtres utilisés pour les produits du tabac[1].

Organisé par le Global Center for Good Governance in Tobacco Control (GGTC), un webinaire international s’est tenu le 13 avril 2023 pour préparer la deuxième session de travaux préparatoires. A cette occasion, Jyoti Mathur-Philipp, représentante du Programme environnemental des Nations Unies, a rappelé combien il est nécessaire que le traité sur la pollution plastique soit juridiquement contraignant, et non pas une simple invitation aux états à élaborer leur propre feuille de route. Louis Vayas Valdivieso, vice-ministre des Affaires étrangères d’Equateur, a appelé à ce que des mécanismes financiers et de mise en œuvre soient déployés pour garantir l’application du traité.

Contrer les pressions et les manipulations des industriels

Nicolas Lopez Calvez, chercheur à la San Diego State University, a souligné que les actions de ramassage de mégots sont souvent le fait des collectivités locales et d’ONG et confirmé que le recyclage des mégots ne fonctionne pas ; il a également relevé que plusieurs articles (5.3, 9, 10, 13, 17, 18 et 19) de la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) peuvent être mobilisés pour lutter contre la pollution environnementale. Carroll Muffett, du Center for International Environmental Law (CIEL), a mentionné que la présence de micro-plastiques était constatée partout et que les produits devraient être systématiquement soumis à des contrôles de conformité.

Chris Bostic, de la branche étatsunienne de Action on Smoking And Health (ASH), a quant à lui regretté que la CIN soit ouverte aux industriels et qu’il n’existe pas de protection contre leurs interférences, comme le prescrit l’article 5.3 de la CCLAT. Il a pointé l’enjeu central du nettoyage, en alertant contre les tentatives de l’industrie du tabac d’en faire un terrain pour des actions de responsabilité sociale des entreprises (RSE). Il a enfin rappelé les messages-clés de la Stop Tobacco Pollution Alliance (STPA) selon lesquels non seulement les filtres représentent des déchets toxiques, mais aussi que les déchets de cigarettes électroniques (jetables ou non) et de dispositifs de tabac chauffé en constituent également.

Faire valoir l’ensemble de ces considérations sera l’un des enjeux de la deuxième session de travaux préparatoires de la CIN. Les intervenants du webinaire ont invité à faire pression sur les gouvernements pour qu’ils participent activement à ce processus de négociations et concourent à l’interdiction des filtres de cigarettes.

Source: Génération sans tabac


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