Nouveau plan du ministère de la Santé pour enrayer le tabagisme, en hausse
Face aux 8 000 décès annuels liés au tabagisme et au nombre croissant de jeunes qui vapotent, un groupe de travail spécialisé propose une dizaine de recommandations
Le ministère de la Santé a annoncé lundi le lancement d’un programme d’action en plusieurs volets pour lutter contre le tabagisme et limiter le nombre de décès et maladies connexes. Portant sur tous les produits du tabac et les cigarettes électroniques, il a été publié et est ouvert aux commentaires.
Ce programme est lancé au moment où le tabagisme fait des ravages sur la santé publique israélienne, car la consommation de cigarettes et l’usage des cigarettes électroniques (vapoteuses) a augmenté ces dernières années, après des décennies de baisse.
Il adopte plusieurs points de vue contre le tabagisme, comme la recommandation de ramener l’âge légal d’achat des produits du tabac de 18 à 21 ans, l’action sur le contenu des produits, l’étiquetage et les mises en garde, la taxation, les restrictions à l’importation et à la vente et enfin l’éducation et la répression. Il est le fruit des réflexions d’un groupe de travail national nommé par le ministère de la Santé en mai dernier pour proposer des solutions.
Ce groupe de travail a consulté de nombreux experts et organisations, médecins, ministères, organisations de citoyens et de parents, chercheurs et représentants de la jeunesse.
« La lutte contre le tabagisme requiert un effort complexe et coordonné. Nous souhaitons mettre en œuvre ces mesures pour prévenir le tabagisme et promouvoir l’arrêt du tabac afin d’améliorer la santé publique », a expliqué le ministre de la Santé, Moshe Arbel.
L’Association israélienne contre le cancer (ICA) s’est réjouie de ce projet global, qui lui semble être un pas dans la bonne direction, tout en soulignant l’importance de mettre suffisamment de ressources dans la balance.
« Le temps est venu d’opérer un changement radical dans les ressources allouées à la lutte contre le tabagisme. Une unité devrait être créée au sein du ministère de la Santé pour veiller à ce que ces mesures soient effectivement mises en œuvre », a déclaré Dana Frost, spécialiste de la promotion de la santé à l’ICA.
Le programme d’action anti-tabac demande l’interdiction de tous les produits à fumer aromatisés, le respect des quantités limites de nicotine dans les cigarettes électroniques et la limitation des quantités de liquide de vapotage autorisées à l’importation, la commercialisation et la vente. Il prévoit également l’apposition d’étiquettes de mise en garde claires et explicites et l’uniformisation des produits et emballages pour fumeurs et vapoteurs.
Le groupe de travail a présenté quatre recommandations concernant la vente de produits à fumer, à savoir l’interdiction des vapoteuses à usage unique, la vente de tabac et produits du tabac dans un nombre limité de points de vente désignés, le relèvement à 21 ans de l’âge légal pour l’achat de produits à fumer et l’habilitation du ministère de la Santé pour faire respecter l’interdiction de la publicité des produits à fumer sur Internet.
Ce programme d’action comprend en outre une série de recommandations concernant l’introduction ou l’augmentation de la taxation de la nicotine et des produits à fumer de toutes sortes.
Comme évoqué plus tôt cet été par le Times of Israel, le tabagisme est un problème majeur de santé publique en Israël. Huit mille Israéliens meurent en effet chaque année à cause du tabac et, parmi eux, 800 des effets du tabagisme passif. Après plusieurs décennies baissières, le tabagisme repart à la hausse, associé aux cigarettes combustibles (tabac) ou électroniques. Les deux contiennent de la nicotine, qui crée une forte dépendance.
Selon un rapport du Centre Taub pour la politique sociale, en 2020, le taux de tabagisme de la population adulte israélienne de 21 ans et plus était de 20 %, ce qui est supérieur à la moyenne de l’OCDE. Un quart des hommes et 15 % des femmes fument, avec des taux plus élevés chez les Arabes que chez les Juifs. La pandémie de COVID-19 a aggravé la situation, un quart des fumeurs ayant augmenté de 13 le nombre de cigarettes qu’ils fument quotidiennement.
Un rapport sur le tabagisme publié par le ministère de la Santé en 2021 indiquait qu’après une baisse significative du tabagisme chez les jeunes entre 1998 et 2019, la tendance s’était inversée. À l’heure actuelle, 20 % des jeunes (plus de garçons que de filles) fument, la moitié d’entre eux fumant du tabac et l’autre moitié utilisant des cigarettes électroniques. Alors que, par le passé, les adolescents venaient au tabac par les cigarettes et les narguilés, dès 2019, on signalait une utilisation accrue des vapoteuses, certaines dès l’âge de 12 ans. Le vapotage est considéré par les experts de la question comme une passerelle vers le tabagisme.
Selon Frost de l’ICA, les couleurs vives et saveurs sucrées et fruitées attrayantes des vapoteuses – en particulier celles à usage unique, peu chères – rendent les enfants accros.
« Il est illégal en Israël de vendre des produits à fumer aux mineurs. Pourtant, les collégiens en sont fans », explique Frost.
Les cigarettes électroniques sont relativement nouvelles (leur utilisation à l’échelle mondiale a considérablement augmenté il y a de cela une dizaine d’années), ce qui explique qu’il n’y ait pas encore d’études à long terme. Cependant, des études internationales évaluées par des pairs présentées dans un document de l’ICA indiquent que les matériaux contenus dans les vapoteuses exposent les utilisateurs aux métaux lourds et à des produits chimiques cancérigènes.
En plus de la dépendance à la nicotine, il est prouvé que le vapotage nuit aux poumons et aux voies respiratoires, au cœur et aux vaisseaux sanguins. Cette année, deux adolescents israéliens ont été hospitalisés pour une pathologie pulmonaire grave causée par le vapotage. L’un d’eux s’est rétabli, mais Meidan Keller, 16 ans, n’a pas survécu lorsque le respirateur a été débranché. Le ministère de la Santé a indiqué qu’une enquête était en cours sur l’arrêt du respirateur.
Depuis 2019, il est interdit de fumer ou vapoter dans les espaces publics fermés. Malgré tout, il est difficile d’éviter la fumée de cigarette en extérieur, où de nombreux fumeurs supposent que le tabagisme ne présente aucun danger pour les autres.
Les recherches menées depuis quinze ans par la professeure Laura Rosen, de l’Université de Tel Aviv, montrent que les personnes qui fument en plein air à moins de 10 mètres des autres mettent leur santé en danger.
En outre, fumer à l’extérieur ne protège pas nécessairement les non-fumeurs situés à l’intérieur d’un bâtiment. Une étude évaluée par des pairs publiée en février dernier par Rosen a mis en évidence le fait que six enfants sur 10 dont les parents limitent leur tabagisme au balcon ou à la cour de leur maison avaient de la nicotine dans le sang et dans les cheveux.
L’avocat Amos Hausner, président du Conseil israélien pour la prévention du tabagisme, a intenté une action administrative devant la Cour suprême au nom de l’organisation Citizens for Clean Air et de plusieurs personnes exigeant une protection contre la fumée des voisins et l’application de la loi de 2008 sur la qualité de l’air.
« Cinquante pour cent de la population en Israël est exposée à la fumée de voisins. C’est un problème, particulièrement dans les zones à faible revenu », conclut Hausner.
Source: Time Israel